
Les fameuses maquettes d’architecture en mousse bleue, popularisées notamment par l’OMA-Office for Metropolitan Architecture, me font inévitablement penser à de petits icebergs. Des petits volumes parfaits aux arrêtes taillées et tranchantes. Le bleu de la mousse dit aux architectes « maquette de travail » ou « work in progress ». Elle est un pur volume, un petit jeu pour passer le temps ou un test tridimensionnel plus sérieux. La mousse bleue clame son absence de spécificité, elle n’est aucun matériau plus qu’un autre, elle ne possède aucune qualité plus qu’une autre. Elle est une matière qui se nie, qui vise à s’effacer derrière un pur potentiel. Générique et vacante : elle est purement indicative, et entièrement libre. On pourrait presque dire qu’elle est froide.
Dans l’installation « Vacant NL, where architecture meets ideas » créée par Rietveld Lanscapes pour la biennale d’architecture de Venise en 2010, les volumes en mousse bleue matérialisaient le potentiel d’utilisation des bâtiments gouvernementaux hollandais inoccupés, laissés vacants. Mis côtes à côtes, tous ces bâtiments fantomatiques et engendrés par la même mono-matière étaient censés évoquer les multiples possibilités de réemploi ou d’usage de ces délaissés architecturaux.
Les blocs suspendus au plafond formaient une nappe continue et dense de maquettes bleues flottantes. En entrant dans le pavillon, on pénétrait un peu comme sous une mer arctique. Les interstices entre les maquettes en mousse évoquant les fissures multiples provoquées par la fonte des glaces.
De ville en mutation potentielle on est passé à ville congelée. Les bâtiments semblent avoir été figés dans la glace, le paysage urbain avoir été immortalisé dans un bleu éternel. C’est un peu comme si cette installation préfigurait une catastrophe climatique en annonçant une ère glaciaire miniature. Une panique calme et silencieuse. Un film catastrophe sans le son.
On y entrevoit alors une ville congelée, figée dans un bleu lumineux. En vérité, j’ai hâte…
Emeric
14/06/2012
C’est beau les tragédies froides.